"Pour un Service public national d'Enseignement supérieur et de Recherche laïque, démocratique et émancipateur"
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Nombre d’étudiants et de membres du personnels du service public d’enseignement supérieur et de recherche ont appris avec tristesse le décès de Georges Molinié. Tous se souviennent de son attitude courageuse pendant le mouvement universitaire de 2009 et entendent lui rendre hommage. Comme lui, d’autres Président-e-s d’université se sont engagés depuis sept ans contre tel ou tel aspect de la loi LRU-1 ou LRU-2, par des déclarations publiques, des tribunes d’opinion, des motions et décisions de refus ou de résistance, maismalheureusement bien trop peu nombreux pour pourvoir infléchir la politique de la CPU. D’autres ont fait le choix de se tenir à l’écart des travaux de cette CPU dans laquelle les participant-e-s ne sont tenu-e-s par aucun mandat issu de ceux qu’ils sont supposés représenter (leurs électeurs, leur établissement) et encore moins de rendre compte des positions qu’ils adoptent dans ce cadre.
Mais tous les présidents d’université, des plus réservés aux plus activistes, en tant qu’ils acceptent de parler d’une seule voix par l’entremise du bureau de la CPU, se sont ainsi constitués en une force particulière, indépendante de leur fonction d’élu, fondée sur le pouvoir et l’autorité et visant à se constituer en lobby pour exercer une influence politique non démocratique.
Les positions de la CPU telles qu’arrêtées lors de sa conférence annuelle de février 2007 à Metz ont fourni les bases de la réforme sarkozyste, imposée en quelques semaines lors de l’été 2007 à travers la loi LRU-1, puis reconduite en 2013 en LRU-2 par le gouvernement actuel sous l’influence de ceux-là mêmes qui avaient agi activement pour la mise en oeuvre de la loi Loi LRU-1. La ministre sarkozyste avait alors manifesté sa gratitude à cette instance en signant le 15 mai 2008 un arrêté attribuant à la CPU l’agrément lui permettant de bénéficier du régime des associations d’utilité publique. Une reconnaissance institutionnelle assortie d’une prime individuelle de plusieurs dizaines de milliers d’euros accordée aux président-e-s d’université pour les inciter à mettre en œuvre cette réforme rapidement et avec zèle ; ce qu’ils ont fait. Ces président-e-s plus soucieu/x/ses de ne pas mécontenter les pouvoirs politiques et économiques que de l’intérêt général des Français et des étudiants, n’ont cessé de contribuer activement et assidûment à l’effondrement institutionnel et budgétaire du service public gratuit de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche, ou au moins de l’accompagner sans protester, tout en augmentant leurs propres pouvoirs d’influence tant aux sommets de l’État qu’à la tête des établissements.
L’autoritarisme présidentialiste qui en résulte et qui envahit les universités,incitées à se transformer en "centres de coûts et de profits", sert à délégitimer toute critique argumentée des orientations de cette politique, toute proposition d’alternative de la part des personnels (le mythe des postes créés, des milliards déversés dans l’ESR...).et à masquer l’effondrement moral et financier du service public universitaire ouvert, jusqu’ici encore, au plus grand nombre. À cela s’ajoute la tendance lourde des réformateurs à vider les instances délibératives de toute représentation significative des personnels et étudiants, réduisant à presque rien le fonctionnement collégial et démocratique des universités.S’inscrit dans cette même logique le mouvement engagé de concentration des universitiés et établissements d’enseignement supérieur et de recherche placés sous l’égide de superstructures (Communautés d’Universitiés et d’Etablissements) en charge du pilotage de la politique de formation et de recherche et de la stratégie d’ensemble. La montée en puissance de ces structures de gouvernement resserré se traduit par la perte progressive de souveraineté des établissements membres, et du fonctionnement démocratique de leurs instances, conséquence d’une logique de "filialisation" des établissements membres à la Comue, prélude à leur absorption fusionnelle à moyen terme.
Les signataires ci-après demandent au gouvernement de reconsidérer l’agrément d’utilité publique qui a été octroyé à la légère et par clientélisme politique à la Conférence des Présidents d’Université et, à l’inverse de la caporalisation patronale des universités engagée par le gouvernement précédent, de redonner du sens à la démocratie et à la collégialité universitaires en réduisant l’omnipotence des présidents d’université au profit des usagers et des personnels, ainsi que de leurs organisations représentatives. Afin de restaurer un début d’équilibre dans une dissymétrie devenue trop voyante et inacceptable, lorsqu’un seul et même groupe d’intérêts exerce une mainmise sur la définition des situations problématiques et la détermination des moyens d’y remédier, nous demandons au gouvernement de redonner, par la voie législative et réglementaire, toute leur place à toutes les catégories de représentants élus au suffrage proportionnel direct dans les composantes et conseils centraux d’établissements ainsi que dans les conseils nationaux de représentation et de régulation de l’enseignement supérieur et de la recherche.