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mercredi 7 mars 2012

Égalité de traitement pour tous les enseignants-chercheurs

Le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche vient de faire parvenir aux organisations syndicales un projet de décret réformant les règles de recrutement des Professeurs des Universités dans les disciplines à « agrégation du supérieur » (sections n°1 à 6 du CNU). Ce texte reprend les termes d’un projet de réforme sur lequel la FERC Sup CGT s’est prononcée le 18 janvier 2012.

La FERC Sup CGT rappelle qu’elle est opposée à cette réforme qui vise principalement à sauver le régime dérogatoire des agrégations externes du supérieur dans un contexte où elles se trouvent plus que jamais menacées en raison de leurs défauts structurels, anomalies juridiques et incompatibilités organisationnelles avec les besoins des universités. Attachée à la défense des concours de la Fonction publique, la FERC Sup CGT réclame la suppression de ces agrégations du supérieur en droit, économie, science politique et gestion, qui s’auto-proclament « concours » mais n’en sont pas. Elle demande l’intégration des 6 disciplines concernées dans le régime général des 71 autres disciplines pour l’ensemble des voies de recrutements, ceci afin d’améliorer la qualité des recrutements et de protéger l’égalité des droits pour l’ensemble des enseignants-chercheurs.

Lorsque la FERC Sup CGT a été consultée sur ce projet, le 15 décembre 2011, le conseiller « enseignement supérieur, sciences humaines et sociales » auprès du Ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche avait assuré que le Ministère s’abstiendrait de tout « passage en force » s’il était constaté que le projet ne faisait pas consensus. Au vu des oppositions massivement exprimées par les Maîtres de Conférences (MCF) des six premières sections du CNU et par de très nombreux Professeurs des Universités (PU) de ces sections, notamment en économie ; au vu aussi de l’incompréhension des enseignants-chercheurs de toutes les autres sections où les PU sont recrutés sans agrégation du supérieur… le projet aurait dû être retiré. L’engagement n’est donc pas tenu et le gouvernement s’apprête à imposer, à quelques semaines des élections présidentielles, un projet contesté et clientéliste.

Les agrégations du supérieur n’ont strictement rien à voir avec les agrégations du secondaire qui doivent être défendues : ces dernières concernent des flux de candidatures, postes et jurys suffisamment nombreux, et comportent des épreuves anonymes. Deux aspects qui, en réduisant les risques d’emprises politiques et de favoritismes clientélistes centralisés, renforcent et confortent le caractère national de ces concours. Au contraire, les agrégations du supérieur n’ont pas d’épreuves anonymes et concernent des groupes si petits que les interdépendances et conflits d’intérêts sont excessivement nombreux, même si les affinités personnelles et politiques sont dissimulables derrières des arguties relatives aux prestations individuelles orales durant les épreuves qui font office de « boîtes noires » pour justifier les cooptations ainsi réalisées.

Par ailleurs, la désignation par le ministre des jurys d’agrégation du supérieur offre au ministre et à son entourage un pouvoir considérable sur le choix intellectuel et politique non seulement du Président du jury, mais aussi, par voie de négociations préalables informelles, sur la composition du jury lui-même. De ce fait, l’influence politique des gouvernements pèse sur ces recrutements. Ce qui nuit gravement à l’indépendance des enseignants-chercheurs de ces disciplines alors qu’elle est reconnue dans la loi et les principes fondamentaux de la République pour tous les enseignants-chercheurs.

L’organisation des épreuves d’agrégation du supérieur marginalise la dimension scientifique du travail d’enseignant-chercheur tant au moment de la sélection des candidats que dans l’esprit des sélectionnés. Par ailleurs, ces recrutements ont depuis longtemps tenu à l’écart les femmes, les personnes issues des classes populaires et aujourd’hui les chercheurs d’origine étrangère ; elles sont un obstacle aux circulations universitaires, de personnes et de savoirs, en Europe et au-delà. Enfin elles ne valorisent ni les efforts soutenus dans le travail ni la compétence acquise dans l’expérience professionnelle mais organisent une sélection précoce de privilégiés en ouvrant les postes de Professeurs des Universités à de simples titulaires de doctorats ou de très jeunes Maîtres de Conférences qui, sans démériter, sont pourtant loin d’avoir l’expérience nécessaire, fruit d’années de travail pédagogique, scientifique et administratif. À l’inverse les MCF plus expérimentés et engagés dans la vie universitaire, dotés d’une Habilitation à Diriger des Recherches, refusent de plus en plus de se présenter au recrutement agrégatif de PU.

Enfin, en raison du faible nombre de postes répartis sur l’ensemble du territoire national et du mode d’affectation par choix successifs des personnes dans l’ordre du classement final, de nombreux candidats sont contraints de choisir des postes très éloignés de leur domiciliation. Ce système archaïque, datant du 19ème siècle, nécessite de rappeler qu’aujourd’hui, en situation d’égalité et de double carrière hommes-femmes au sein d’un couple, et dans un système institutionnel français hypercentralisé, le dispositif conduit ainsi les personnes sélectionnées par les agrégations du supérieur à des parachutages dysfonctionnels sur des universités qu’ils cherchent à quitter au plus vite pour rejoindre, notamment celles de Paris qui peuvent ainsi privilégier le recrutement par la mutation plutôt que par la voie agrégative. Ce système aspire vers la capitale l’essentiel des énergies et laisse les autres universités démunies, voire en situation de sous-encadrement. Ce qui favorise alors les privatisations latérales (classes préparatoires privées, cours privés de soutiens et d’accompagnements, écoles privées…) au détriment de la qualité du Service public.

Pour l’ensemble de ces raisons, la FERC Sup CGT réitère sa demande :

  • d’intégration des 6 disciplines concernées dans le régime général des 71 autres disciplines pour l’ensemble des voies de recrutements. Ce qui ne préjuge en rien des revendications qu’elle porte sur ce système de recrutement et sur les améliorations nombreuses qu’il est nécessaire d’y apporter.
  • De suppression des agrégations externes du supérieur.

Elle appelle les enseignants-chercheurs de l’ensemble des sections du CNU à manifester leur désaccord avec ce projet de réforme et à signer massivement la pétition à l’initiative de collègues des sections 1 à 6 :

http://petitionpublique.fr/PeticaoVer.aspx?pi=P2012N20740

Voir également :
- L’article de Jérôme Valluy "Faut-il sauver les agrégations du supérieur ? (non)" sur son blog Médiapart.