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mardi 27 mai 2014

La CGT s’oppose à la mise en place d’une nouvelle agence d’évaluation de l’ESR

En préalable, nous tenons à contester la politique d’austérité imposée par le gouvernement et amplifiée par le pacte de responsabilité. Les conséquences sont dramatiques sur le fonctionnement des établissements, sur les personnels et sur les usagers du service public. Dans ce contexte, l’évaluation des établissements et de leurs composantes vise essentiellement à permettre des "économies" budgétaires et à pouvoir justifier les restructurations associées. Bien loin d’une évaluation scientifique permettant d’aider à l’amélioration du service public d’enseignement supérieur et de recherche, l’évaluation managériale sert non pas à faire progresser les entités mais à en supprimer certaines ou à réduire les moyens financiers mis à disposition des autres. 

L’emploi pédagogique, scientifique, technique et administratif dans nos établissements, laboratoires et services, est menacé par la baisse programmée des recrutements et le refus de résorber de façon notable la précarité. L’évaluation managériale, bien loin de toute finalité scientifique avec une recherche d’objectivité, ne vise qu’à aggraver cette dégradation des statuts et des emplois... et finalement du service rendu au public. 
Les financements pérennes sont en perpétuelle décroissance et notoirement insuffisants par rapport aux besoins.

Dans de telles conditions de pénurie organisée, comment croire que les procédures d’évaluations proposées soient basées sur des considérants scientifiques visant exclusivement à l’amélioration du niveau de l’enseignement supérieur et de la recherche ? Ainsi, l’ancienne agence AERES, si unanimement décriée par les communautés scientifiques, n’a pas servi d’autres objectifs que ceux des contrôles politiques opaques et des coupes budgétaires. Nous voulons rappeler les critiques que nous avons porté sur le fonctionnement de l’AERES. L’agence a mis en pratique une évaluation managériale des unités et des établissements. 

  • Évaluation chronophage et excessivement couteuse en temps et en moyen pour les structures évaluées.
  • Évaluation pratiquée exclusivement par des personnes nommées et choisies en dehors de tout principe de démocratie, évaluation qui exclut les personnels techniques et administratifs des commissions d’audit.
  • Évaluation sanction ayant des conséquences sur les financements et dénuées de tous les principes de l’évaluation conseil qui existait dans les procédures antérieures comme celles du CoCNRS par exemple.
  • Évaluation concentrée sur les choix émanant de la seule direction de l’AERES et des critères imposés par le gouvernement.
  • Évaluation incluant d’une manière ou d’une autre l’évaluation des personnes (critères des publiants par exemple) et ayant de conséquences potentiellement dangereuses sur les carrières des personnes (certaines ayant été exclues de leur laboratoire pour faire remonter la note de celui-ci).

Faute d’avoir eu le courage politique de supprimer purement et simplement cette agence, le gouvernement à fait le choix d’un réhabillage par simple changement d’intitulé. Le projet de HCERES, en remplacement de l’AERES, tel qu’il apparaît dans ce projet de décret est aussi inacceptable dans sa configuration et ses finalités que l’agence qu’il est supposé remplacer : 

  • Le projet de HCERES, dans sa composition, ne fait aucune place aux compétences scientifiques pas plus qu’à la représentation des personnels. Nous constatons et contestons l’absence de représentants élus au scrutin proportionnel direct par les scientifiques et personnels au sein de ce conseil.
  • Ce projet de décret instaure un Président aux pouvoirs personnels exorbitants qui, par refus de signature des décisions de son Conseil ou refus de contreseing des rapports d’évaluation, mais aussi par son pouvoir de nomination des experts, peut décider de tout ou imposer ses opinions sur toute décision.
  • Dès l’article 1 du projet de décret, le gouvernement veut imposer un critère d’évaluation, relatif à la "coordination des territoire", c’est-à-dire à la régionalisation de l’enseignement supérieur et de la recherche voulue par simple intérêt partisan d’hégémonie actuelle sur les conseils régionaux. Cela ne permet pas d’envisager la moindre évaluation rigoureuse de la qualité des entités sous l’égide du HCERES. 
  • Aucune garantie de rigueur dans le travail du HCERES n’est apportée par l’institution de procédures de recours et de contre-pouvoirs indépendants : la "commission des recours et des plaintes" n’est indépendante ni du Président qui la nomme discrétionnairement ni du Conseil dont elle est issue ; ses modalités de saisine par les entités évaluées ne sont pas définies par le décret ; ses prérogatives décisionnelles ne le sont pas davantage.
  • Les clauses d’incompatibilité entre le mandat d’expert et d’autres fonctions sont tout à fait insuffisantes pour prévenir les innombrables conflits d’intérêts qui traversent les processus d’évaluation de services et aucune procédure n’est prévue pour délibérer sur les situations de conflits d’intérêts qui apparaîtraient.
  • La collégialité du travail au sein des comité d’experts n’est absolument pas garantie faute d’avoir prévu une clause explicite permettant à chacun d’exprimer d’éventuelles réserves sur le contenu d’un rapport ou des opinions divergentes sur l’évaluation des entités. De même, la signature individuelle de chaque expert composant un comité n’est pas requis pour la validité du rapport.

Par ailleurs nous tenons à rappeler notre refus d’une régionalisation de la recherche et de l’enseignement supérieur, qui passe en ce moment par la mise en place à la hussarde des COMUE . Dans le cadre de la territorialisation de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, les ComUE sont la clé de voûte du dispositif de recomposition de l’Enseignement supérieur et de la Recherche autour d’une trentaine de « sites » pilotés par les régions. Le gouvernement aura de larges marges de manœuvre pour imposer les fusions et les ComUE (à un rythme plus ou moins rapide selon les résistances) : en effet, c’est le ministère qui tient les cordons de la bourse. Ces regroupements visent à réduire drastiquement le nombre d’universités et à démanteler les organismes de recherche publics en les fusionnant. Les formes de regroupement ne sont certes pas identiques et n’ont pas les mêmes implications immédiates pour les personnels, mais quelle qu’en soit la forme, l’objectif est le même : la réduction de la masse salariale des établissements, la réduction des coûts, les économies d’échelle, une restructuration d’ampleur de l’enseignement supérieur et de la recherche, avec des conséquences néfastes pour les personnels et les étudiants. En faisant de cette politique l’axe central de constitution du HCERES, dès l’article 1 par référence aux "coordinations territoriales", le gouvernement fait le choix non seulement de décrédibiliser toutes les évaluations qui seront produites, mais également de subordonner les établissements concernés aux jeux politiques locaux que ce soit au sein des ComUE ou des Conseils régionaux. De cette façon, le HCERES sonnerait le glas des évaluations nationales et annonce un renforcement des particularismes régionaux voire régionalistes. Cette disposition est aussi porteuse de la liquidation des EPST nationaux au-travers des possibilités d’évaluation sous couvert des ComUE. C’est aussi pour toutes ces raisons que la CGT demande un moratoire immédiat de la mise en place des ComUE.

Ce projet de décret sur le HCERES que vous nous soumettez ne revient pas sur les critiques que avions formulées sur l’AERES... voire même il en aggrave certains aspects. Pour le CNRS et l’INSERM, il ne permet pas le retour de l’évaluation des équipes aux instances scientifiques des organismes qui pratiquaient une évaluation nationale comparative réalisée majoritairement par des collègues élus par leurs pairs. Au contraire, il peut transférer l’évaluation aux COMUE, voire à des cabinets d’audit.. Au contraire, il peut transférer l’évaluation aux COMUE. Nous le considérons donc comme l’outil complémentaire des ComUE pour la restructuration des Universités et des EPST sur des objectifs contraires au service public. 

De fait, il assume une accélération des choix mis en œuvre par la loi LRU-Fioraso. Nous nous prononçons contre la mise en place d’une telle nouvelle agence d’évaluation.